À Rurutu, un agriculteur s'apprête à lancer un atelier de transformation. À lancer un atelier de transformation. Pour l'instant, il exporte quelques produits vers Tahiti, principalement taros et citrons, il fournit la pension et le magasin familial de l'île.
© Texte & photos : Delphine Barrais

Jean-Claude Taputu est agriculteur à Rurutu. Il a quelques animaux, « juste ce qu’il faut », un cheval pour les courses du Heiva et du jour de l’an, des cochons pour la famille, 300 poules pondeuses pour ravitailler le magasin familial et les cuisines de la pension. « Ce qui n’est pas assez », commente l’agriculteur au passage, « il n’y a pas assez d’oeufs pour répondre à la demande. »
Il a également des agrumes (citrons, pamplemousses, mandarines, clémentines), des taros, des légumes et des fruits. Il s’est désormais lancé dans un projet de transformation pour valoriser les invendus.
« Si tu ne plantes pas, ça ne pousse pas ! » lance, amusé, Jean-Claude Taputu en introduisant la visite de son exploitation.
Derrière cette phrase d’apparence banale se cache toute la philosophie de l’agriculteur, simple, humble et pragmatique. Pour réussir, il faut travailler, tester, observer, écouter la terre, suivre les vents. L’homme n’a pas le pouvoir de décision, il a le devoir d’adaptation. Il lui faut innover. Lui ne s’en lasse pas.

« Partout où je passe, je plante »
Il prépare la terre, nourrit, sème, plante, récolte, désherbe. Il essaie de nouvelles espèces et variétés. Là un ‘uru hybride trouvé à la Dag. « On a du rare et du puero, on ne trouvait pas de paea. C’est chose faite. » Il insiste : « partout où je passe, je plante ». Il choisit ses plants en fonction de leurs saveurs, leur performance, leur saisonnalité. « Le but c’est d’avoir un maximum de choix toute l’année. » Il montre par exemple une espèce de mandarinier qu’il a du mal à faire partir, se réjouit de voir fleurir d’anciennes variétés. Il a essayé la pomme, la pomme de terre et l’oignon, en vain. Il a voulu se lancer dans l’apiculture mais il n’a pu consacrer aux ruches le temps et l’attention dont elles avaient besoin. Il a démarré le tarua (il s’agit d’un vivrier de la famille des taros qui
se développe en zone sèche) il y a 9 mois et devrait également se mettre à la canne à sucre, sollicité par un fabriquant de rhum de Tahiti.

Les touristes de la pension qui le désirent peuvent se rendre sur l’exploitation, aider à la cueillette. « Sur place, ils peuvent manger tout ce qu’ils veulent. » Surtout ils profitent d’une visite guidée et passionnée. Le compost de la pension ainsi que la matière organique des poules et cochons fertilisent les sols des espaces maraichers. Les fruits qui ne sont pas consommés et vendus finissent en confiture. Pour aller plus loin, il est désormais question de transformer les vivriers. « Le processus est établi, les contacts pris, les machines identifiées. »

L’atelier sera installé au village, il permettra d’éplucher, couper et surgeler les tarua, taros, maniocs… « Ensuite, on pourrait valoriser les citrons par exemple, il en tombe tellement. On fera du citron confit, c’est tout simple. » Jean-Claude Taputu ne réservera pas l’atelier à sa seule production. Il espère que d’autres suivront. Pour faire venir les jeunes générations, il est devenu indispensable de s’équiper et ne plus se contenter de planter et récolter. « J’ai compris qu’il fallait mécaniser, car plus personne ne veut travailler avec une pelle et un couteau »