Textes : Frédéric Torrente - Anthropologue
Les migrants polynésiens avaient sélectionné plusieurs variétés de cocotier en fonction des usages particuliers. Le kaipoa est la variété de cocotier comestible la plus répandue (noix sucrées et saines), résultat d’une sélection minutieuse des Pa’umotu depuis des temps reculés.
Les stades de développement des cocos portent un nom précis :
(1) poniu : noix à peine formée,
(2) pūriri : noix qui commence à prendre sa forme,
(3) kōuo : jeune noix dans laquelle la chair n’a pas pris forme mais l’enveloppe est comestible et tendre,
(4) kōuo tovarevare : noix dans laquelle la première chair est gluante (varevare),
(5) rehi : stade suivant dans lequel l’eau devenait buvable et la chair commençait à s’épaissir,
(6) viavia : stade où l’eau était la meilleure à boire. La chair était bien formée à ce stade mais reste molle,
(7) kōmoto : noix buvable dans laquelle le liquide est effervescent (togarugaru) et la chair assez dure,
(8) meka : le stade intermédiaire entre kōmoto et gora,
(9) gora : noix complètement mûre,
(10) maguna : la chair a atteint son épaisseur maximale,
(11) nounou : coco germé qui se remplit d’une masse spongieuse (uto) qui est mangée,
(12) vavako : vieille noix sèche, sans eau.
L’amande de la noix de coco (pūhā, pufa) pouvait être mangée, rāpée pour extraire le lait de coco (hinu gora), fermentée (mitihue), ou séchée (fabrication du monogi). L’eau des noix peut être bue au stade viavia (komo viavia) ou au stade komoto pour une eau pétillante. On consommait cru les parties suivantes : le germe nounou, la chair molle peut être mangée au stade kouo, ou durcie au stade kaipoa ou vavako. On mange également le nounou, ou coco germé. D’autres parties du cocotier sont comestibles comme le cœur du cocotier mukomuko, les jeunes pousses omou des folioles de palmes (nana). On pouvait faire cuire le nounou et le kaipoa. Le coco au stade rehi mamagu était cuit et servait de médication.
En dehors de son utilisation alimentaire (eau de boisson et nourriture), le cocotier avait mille autres usages. Les plantations de cocotiers étaient également placées sous restriction temporaire (rāhui) selon un système de jachère.
Autres plantes alimentaires des atolls
Le pokea (Portulaca lutea) : la tige et les racines du pourpier étaient cuites au four en terre, pelées puis mangées avec du lait de coco et du poisson cru. On mangeait également les baies rouges du hihiteka (Cyclophyllum barbatum) et le fruit jaune du rama (Ximenia americana). Les racines cuites du pourpier pokea (Portulaca lutea) étaient consommées, tout comme les feuilles du horahora ou le fruit noir visqueux du napau (Grewia crenata).
Le fruit du nono (Morinda citrifolia) constituait un aliment de substitution en temps de disette, comme l’écorce interne râpée (oneone) du mikimiki (Pemphis acidula).
Au total, toutes les pratiques horticoles des atolls étaient contrôlées par un ensemble de rites destinés à favoriser la fertilité de la terre et l’abondance des ressources végétales : on vouait par exemple un culte à Rongo, le dieu des plantes cultivées, par un système d’offrandes sur le marae de la communauté afin d’attendre en retour des cultures abondantes.
Ces rites étaient pratiqués sous l’autorité du chef (ariki), intermédiaire entre l’humain et le divin.
D’autre part, de nombreux tapu concernaient les plantations, qui pouvaient être placées sous restriction temporaire (rāhui) le temps des premières récoltes, en fonction de cycles d’imposition et de levées des interdits.
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