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Blue composite - La résine par injection, une révolution !

Voici quelques mois que l’équipe d’Investir à Tahiti est séduite par le projet de villas sur lagon, créé par la société « Elyt Charter ».

En attendant la mise à l’eau de la première unité, prévue pour le début d’année 2020, nous avons cherché à comprendre le fonctionnement du chantier naval Blue Composites, qui façonne actuellement le master de la première villa. Rencontre avec l’architecte Nicolas Gruet et le chef de chantier Alexandre genton, à la tête d’un chantier naval qui compte désormais dans le paysage des constructeurs de bateaux en Polynésie.


Nicolas Gruet

Nicolas Gruet est architecte naval depuis plus de 20 ans. Après des études d’architecture traditionnelle à Nantes, il s’est spécialisé en architecture navale. Après deux premières expériences en France, notamment aux Chantiers de l’Atlantique, il est embauché à Papeete, en tant qu’architecte bâtiment cette fois, en janvier 2002. Quelques mois après, il crée son bureau d’architecture navale dans la capitale tahitienne.


Pas de composite à Tahiti

Blue Composites est un chantier naval qui existe depuis le 2e semestre 2017. Il a été créé pour répondre à la problématique de production du projet Elyt Charter, réalisation « qui se situe entre le bateau de charter lagonnaire et un house-boat », selon Nicolas. Blue composites est donc né de la rencontre avec Torea et Emily, qui cherchaient un architecte naval pour leur projet d’Elyt 52’. Au moment du chiffrage du projet, en 2015, Nicolas aiguillait plutôt Emily sur des matériaux qui permettaient une construction sur le fenua : le premier projet fut donc un bateau en aluminium (3 chantiers locaux auraient pu l’assurer), qui répondait à la contrainte de durabilité et surtout, parce que Elyt 52’ n’est pas un bateau de plaisance, mais un bateau professionnel, d’un minimum de maintenance.


Un matériau intelligent

Pourquoi du matériau composite alors ? Cette villa sur l’eau aurait pu être construite en aluminium ou en bois époxy. Le composite a été privilégié car il est léger (ce qui permet d’avoir des moteurs moins puissants, en l’occurrence pour ce projet des moteurs électriques avec un apport d’énergie solaire), durable, très résistant dans le temps (grande pérennité sur le matériau). « Finalement, le composite l’a emporté, alors même qu’il n’y avait pas de chantier à Tahiti. Parce que c’est le matériau le plus intelligent pour faire des bateaux plus évolués. Le composite, c’est zéro maintenance. Même l’aluminium, il faut changer les anodes, etc. On est donc contraints de sortir le bateau régulièrement.


Avec notre technique il ne peut pas y avoir de problème d’osmose grâce à notre matériau composite à base de résine vinylester, qui est par nature extrêmement résistant aux agressions extérieures. Enfin, au niveau de l’entretien, c’est minimal. Avec le composite, sans contrainte de performance, comme cela sera le cas avec Elyt 52’, si on souhaite laisser moules et algues coller à la coque, cela n’a aucune importance : cela n’attaquera pas la coque et n’entamera pas ses propriétés mécaniques. » Quand Nicolas Gruet en parle, on est vite convaincus.


Le pari fut relevé

Il fut donc décidé que le projet Elyt’ serait réalisé en composite.

Restait à trouver le chantier qui saurait maitriser les matériaux composites à base de résine vinylester, ainsi que le processus de mise en œuvre dédié à cette résine, l’infusion sous vide.Tahiti ne possédant pas encore de chantier compétent dans ces nouveaux process, la Chine fut évoquée, mais avec des frais d’approche énormes (risque de non fin et surcoûts imprévus). Finalement, le pari de créer ce chantier en Polynésie fut décidé. Restait à le concrétiser.


Commence alors un long travail de recherche de près de deux années, durant lesquelles il aura fallu trouver l’emplacement du chantier, son nom, l’équipe de futurs salariés, le financement des travaux d’installation et du matériel spécifique au processus de mise en œuvre des composites, et les fournisseurs de matières premières, ces dernières n’étant pas disponibles localement. Enfin, au mois de Juin 2017, les premiers employés de Blue Composites Tahiti finalisent l’installation du chantier dans son local de Motu-Uta, l’aventure peut commencer.

Comment se présente le matériau composite ?

Les matériaux viennent de plusieurs pays : NZ, USA, Europe, Chine.

La mousse est livrée en plaques. Les fibres sont toujours en rouleaux de différente largeur, comme du tissu ; la résine est en drum (fûts). Certains fabricants fournissent de la résine pré-accélérée, avec un temps d’utilisation réduit de 3 mois : or, c’est le temps que prend le transport depuis la France. Blue Composites a donc demandé à ses fabricants de lui fournir de la résine avec une durée de vie prolongée.


Les fournisseurs ont intégré les paramètres locaux : température, hygrométrie, etc., pour mieux s’adapter aux conditions climatiques de Tahiti. Pour ces résines à longue conservation, il y a un accélérateur et un catalyseur. L’accélérateur met en place une réaction chimique lente qui permet d’utiliser la résine pendant 3 mois. Ensuite, elle aura durci. Le catalyseur est ajouté au moment de l’utilisation : le durcissement se fait alors dans l’heure. C’est la meilleure formule pour travailler sous nos latitudes.

L’infusion

Les stratifications par infusion sont réalisées dans ce que Blue Composites appelle « la salle blanche », une salle climatisée de 17 m de long et 4 mètres de large pour 3 m de haut !) avec déshumidification de l’air, qui permet d’avoir des conditions idéales pour la stratification de grandes pièces comme des coques de bateau. Les moules sont en fibre de verre et résine vinylester. C’est un travail très long et très coûteux. On appelle cela l’outillage. Une structure en acier renforce le moule, afin de garantir sa rectitude, pour le protéger et le déplacer.

Dans ce moule vont être déposées des couches successives de fibres et d’âme qui constituent l’échantillonnage du bateau : les fonds sont en monolithique de verre (pour pouvoir être très solide à l’impact) et, plus on monte sur la coque du bateau, plus le sandwich mousse est privilégié, de façon à alléger et être plus raide.


Toutes ces couches seront installées à sec sur le moule, lors du « drapage », lorsque le complexe de composite est entièrement constitué, l’ensemble est bâché, avec un réseau drainant qui va d’une part retirer l’air jusqu’à une dépression de -800 mbar grâce à une grosse centrale à vide qui permet de tirer un vide très précis (tous les paramètres sont alors contrôlés depuis la console centrale) puis dans un second temps permettre l’arrivé de la résine sous vide, grâce à une machine mélangeuse/injecteuse qui se charge de contrôler la pression d’arrivée de la résine ainsi que son taux de catalyseur.


Si la préparation est longue (le drapage des couches de fibres, à sec, peut prendre jusqu’à 3 semaines), une coque entière est infusée en 5h maximum, sans aucune salissure (rien à voir avec la stratification au contact utilisée dans les chantiers de construction polyester). Aspirée à la place de l’air, la résine se répand partout dans les couches de fibres et de mousses.

Une infusion nécessite pas mal de réflexion et beaucoup de savoir-faire pour être réussie.

Beaucoup d’argent est investi dans le moule, en matière première comme en temps de travail… des sommes colossales seraient perdues sans un travail préparatoire minutieux. Le Blue Power 31 c’est 2 semaines et demi de drapage en intérieur, autrement dit plusieurs millions de matériau et de main d’œuvre.


En 5 minutes, tout ce travail pourrait être ruiné si la machine est mal utilisée, si la résine est de mauvaise qualité, si le vide n’est pas parfait etc…


Chantier naval de précision

Il faut savoir qu’une infusion classique se fait à partir de touques de résine de 20 kilos, remplies manuellement, avec le durcisseur intégré. Autrement dit la résine peut commencer à durcir avant même d’être arrivée dans le moule, cela peut arrêter l’infusion prématurément et gâcher tout le travail effectué en amont !


Chez Blue Composites, avec la machine à injection sous vide, chaque goutte de résine qui pénètre dans la pièce vient à l’instant seulement d’être mélangée au durcisseur. Tous les réglages de la machine sont contrôlés par un opérateur qualifié durant toute la phase d’infusion. Quand l’infusion se termine, la machine à injection s’arrête seule, car elle a détecté la fin de l’infusion. Ainsi, pas de perte de matière première et un travail de grande précision est réalisé.

Blue composites est peut-être un petit chantier naval au bout de la digue de Motu Uta, mais il est équipé de façon ultra précise et animé par des professionnels. C’est très rassurant de voir que notre île est ainsi équipée à la pointe, dans le domaine naval notamment. Pour des investisseurs, des propriétaires de voiliers de luxe ou pour le développement d’unités lagonnaires de série, c’est important d’avoir de telles compétences sur le Territoire.


Près de 2 ans après

Aujourd’hui, Blue Composites est composé de 10 salariés dont 2 postes de dessinateur (bureau d’étude) et dirigé par Alexandre, le chef de chantier (cf. Portrait p. 83) et Nicolas.

Le chantier naval est en bonne voie :

- 2 bateaux de série sont prévus :

• Elyt 52’, avec une production de deux unités par an

• et Blue Power 31 : la mise à l’eau du premier bateau est imminente

(RDV sur facebook@bluecompositestahiti/ et sur tahitimagazines.com pour admirer les premières images).

Pour le Blue Power, 3 unités maxi par an seront construites.

« C’était une commande d’un client qui va devenir une série, après la création d’un outillage spécifique qui permet de réaliser des modèles de 25 à 31 pieds, de façon à répondre aux budgets et souhaits d’utilisation

des clients. » rappelle Nicolas Gruet.


Polyvalente, la conception permet ainsi au Blue Power, actuellement créé en formule « plaisance luxe » d’être aussi décliné en bateau de plongée pour une vingtaine de plongeurs (très optimisé), pour le transport NUC de 12 passagers et 2 membres d’équipage (excursions) ou encore en navette avec roof et cabine pour le transport hôtelier.


- le département réparations est performant, autant pour les bateaux locaux que pour les plaisanciers internationaux. Des réparations des mâts et de poutres en carbone pour des voiliers à hautes performance sont réalisées régulièrement à Blue Composites.

 
Alexandre Genton

Présentation d’Alexandre Genton associé

et chef de chantier de Blue Composites

Le composite, une affaire de passion,

de réflexion, et de savoir-faire


Alexandre avait 7 ans quand il est arrivé en Polynésie. Il grandit à Moorea au bord de l’eau et, d’aussi loin qu’il se souvienne, il a toujours voulu être architecte naval. S’il n’a pas suivi d’études, longues, il n’a jamais cessé le dessin ni abandonné son souhait de construire des bateaux. Tourné très vite vers la construction, avec un père entrepreneur, il fabrique en autodidacte ses propres pirogues en bois et à voile, tout en travaillant comme skipper.


En 2009, il les expose au salon

made in fenua et gagne aussitôt

un prix d’innovation. Grâce à cela,

il rencontre Hiria Ottino, qui cherche

alors un constructeur pour relier Papeete à Shanghai en pirogue traditionnelle.


Alexandre Genton en devient le constructeur, sous la direction d’un architecte naval…

Nicolas Gruet. Alexandre multiplie ensuite les expériences toujours autour du monde nautique, avant de créer avec un associé une entreprise de pirogues à voile pour équiper les hôtels. C’est là qu’il s’intéresse au composite, car il faut allier beauté et durabilité pour une utilisation hôtelière durable. Le mix du bois époxy stratifié avec de la fibre de verre haut de gamme, résistante et totalement transparente, est une réussite. Pour des rameurs de va’a de bon niveau, Alexandre travaille aussi les accessoires en carbone. Il se familiarise alors avec la stratification sous vide, puis avec l’infusion, et utilise des matériaux composites très techniques.


Blue Composites était sans aucun doute la suite logique de cette aventure…

« L’architecte dessine une coquille vide. Notre travail à l’atelier est de faire en sorte que ce soit construisible,

le plus facilement possible et à moindre coût. Fabriquer une pièce peut ainsi prendre 3 jours de réflexion,

car il y a 10 façons différentes de la façonner. » Alexandre Genton, chef de chantier

 

Contacts

Blue Composite

Motu Uta, Papeete - Route de la digue ouest

Tél . + 689 40 57 65 75

Architecte naval : Nicolas Gruet

e-mail : ng@bluecompositestahiti.com

Chef de chantier : Alex Genton

e-mail: ag@bluecompositestahiti.com

Facebook : bluecompositestahiti/


Investir à Tahiti #03 - octobre 2019


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