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Augustin Vonken l'agriculture explorateur de la Presqu'île

Ancien pharmacien chimiste des armées, Augustin Vonker est aujourd’hui agriculteur sur le plateau de Matea à Taravao. Il plante, teste, observe puis cultive des végétaux variés. TOUS SONT CERTIFIÉS BIO. Il vient de terminer la construction d’un poulailler en bois. Un prototype qui devrait rapidement séduire les éleveurs soucieux du bien-être de leurs animaux.



« Quand tu arrives à Vairao, appelle-moi. »


Telles sont les indications d’Augustin Vonken destinées à ceux qui souhaitent le rencontrer en son domaine. Une fois à Vairao, il faut bifurquer côté montagne, traverser un terrain vague, passer un gué plus ou moins humide selon la saison, puis suivre un chemin ombragé et rapidement dénivelé sur près d’un kilomètre.


La route est étroite, chaotique en raison des racines traversantes et des trous creusés par les dernières pluies. Elle serpente en lacets. Enfin, le paysage s’ouvre : c’est le plateau de Matea.


« Au XIIe ou XIIIe siècle, c’était un hôpital », raconte le propriétaire. « Je l’ai acheté en 1993. » Le terrain s’étend sur une quinzaine d’hectares. Là, les tahua se réunissaient une fois l’an avec les malades qu’ils n’avaient pu guérir. « Ce plateau s’appelait en réalité Maatea, mais une faute s’est glissée lors de l’inscription au cadastre. »


Maatea signifie lumière blanche, blancheur.

Les êtres de lumière restés installés sur leur terre auraient demandé à Augustin Vonker de faire rectifier le nom. « Mais ce n’est plus possible », regrette-t-il. L’administration s’y refuse.


Des fleurs aux fruits

Augustin Vonken est un ancien pharmacien chimiste des armées. Après avoir acquis le terrain, il a exploité des tiare Tahiti (Gardenia taitensis). Il s’est équipé d’un extracteur et, avec son frère Joël, a lancé un parfum baptisé « Vaihere ». Sur les 120 000 flacons produits, une partie a été vendue à l’exposition universelle de Shanghai en 2010. Depuis, l’appellation a été perdue.


Au fil du temps, les fruitiers ont remplacé les tiare Tahiti.



Puis, Augustin Vonken s’est lancé dans le maraîchage. Ses cultures sont bio depuis toujours. Elles sont certifiées par le SPG Bio Fetia depuis novembre 2020. Il sélectionne les variétés les plus résistantes, sans cela il est obligé de pulvériser des décoctions à base de feuille de clitoria, de moringa, d’aubergine sauvage… pour venir à bout des insectes. Il s’appuie sur les plantes compagnes pour organiser les plantations.


Il fait pousser des pois de diverses variétés, des haricots, des pastèques, des carottes… Il a également du gingembre, du curcuma, des herbes aromatiques, de l’artemisia, de la citronnelle, du moringa. « J’aimerais faire des infusions avec ces plantes », annonce-t-il.



Dans sa pépinière, il réalise des tests avec, par exemple : des cognassiers, des fraises, des endives ou de la betterave. Les semis ont pris. Il voudrait faire pousser de l’ail, de l’oignon

jaune. « C’est la curiosité d’un pharmacien qui parle », s’amuse Augustin Vonken.


« Je cherche tout le temps. »

Il reconnaît que, parfois, les essais tournent court.

« Certains sont malheureux.

Par exemple, j’ai planté de la goyave verte, la grosse, celle qui vient d’Hawaii, mais les fruits n’avaient pas assez de saveur. »



Lui a le goût des bonnes choses. Ses parents cultivaient du café sur Tahiti. Une espèce d’arabica qu’ils stockaient parfois plusieurs années, puis torréfiaient eux-mêmes. « On ne torréfiait jamais la récolte de l’année », précise Augustin Vonker qui, avec sa soeur, était chargé de la livraison. Un jour, la famille s’est fait voler tout son stock et a abandonné. « Cela aurait été trop long de le reconstituer », explique Augustin Vonken.


Aujourd’hui, il a replanté des pieds de café et envisage de s’équiper d’un dépulpeur pour reprendre le flambeau.

Un poulailler exemplaire

Augustin Vonken est cultivateur, et éleveur.


Il a des canards, des poulets de chair, des moutons et des poules pondeuses depuis trois ans. Récemment, il a souhaité passer ses oeufs en bio. Sylvain Todesco, consultant, cofondateur de Red Gallinica Tahiti, raconte : « il m’a appelé en juin 2021, il y avait beaucoup de choses à faire évoluer avant de faire une demande de certification. Il n’y avait pas, par exemple, d’abreuvoir automatique ou de mangeoire adaptée. » Les abris n’étaient pas aux normes. D’un commun accord, éleveur et consultant ont décidé de construire un abri tout neuf et original. « C’était la bonne occasion de mettre au point quelque chose de nouveau et d’exemplaire. » Sylvain Todesco aurait aimé utiliser du bois local et du PVC car c’est un matériau qui ne garde et ne diffuse pas la chaleur contrairement à la tôle couramment utilisée sur le territoire. Le bois (du pinus) était disponible, le PVC ne l’était pas. Il a été remplacé par de la tôle judicieusement positionnée.


À propos des règles générales de construction d’un abri pour les poules pondeuses dans le cadre d’un élevage bio, Sylvain Todesco précise : « Il faut, pour le bien-être de l’animal, quelque chose de suffisamment grand, qui ne garde pas la chaleur, qui soit aéré, que l’on puisse nettoyer correctement. » Il a participé à la rédaction du cahier des charges « élevage de poules pondeuses bio » du SPG Bio Fetia et a donc pu donner des conseils précis.



Le binôme a avancé pas à pas, prenant son temps. Il a d’abord choisi l’emplacement en tenant compte de l’environnement. Une dalle en béton a été coulée, elle est recouverte de paillage. Le bâtiment, tout en hauteur mesure 48 mètres carrés et s’ouvre sur un parcours arboré de deux fois 500 mètres carrés. Les poules courent pendant une période sur l’un des parcours, puis elles sont basculées sur l’autre pour ne pas épuiser les sols. Les cloisons du poulailler ne montent pas jusqu’au plafond pour laisser passer l’air et ventiler l’espace afin de réduire chaleur et humidité. Pour l’instant, 200 poules profitent de leurs nouveaux pénates. Elles sont jeunes, toutes ne pondent pas encore. L’aventure commence.


Auguste Vonken a un quota maximum de 500 animaux, il envisage de construire d’autres bâtiments en faisant, si c’est possible, évoluer les matériaux. « Pourquoi ne pas utiliser du bambou, par exemple ? » En attendant, l’éleveur devrait faire une demande de certification sous peu pour valider toute sa démarche.





Vous souhaitez en savoir plus ?

Dossier à retrouver dans votre magazine Tama'a# 23 - mai 2022

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