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Benoît Rivals

Le monsieur vélo du fenua

Texte : Virginie Gillet


Savez-vous que l’on désigne le vélo sous le surnom de "petite reine" en hommage à Wilhelmine d’Orange-Nassau ? C’était une jeune Néerlandaise qui devint reine des Pays-Bas à l’âge de 10 ans et impressionna les Français en 1898 lors d’un passage à Paris, du fait de sa passion pour la bicyclette. Cette dernière a suscité moult grandes passions depuis son invention au point de réunir aujourd’hui des millions d’adeptes à travers le monde. Parmi eux, Benoît Rivals, un ancien gendarme installé depuis 1999 en Polynésie où il a créé, en marge de plusieurs entreprises, un événement sportif majeur : La Ronde Tahitienne, dont la 8e édition aura lieu le 19 mai prochain à Tahiti.




InstanTane : Comment est née ta passion pour le cyclisme ?

Benoît Rivals : “Quand j’étais enfant - j’ai eu l’occasion de lui raconter cette anecdote il y a quelques années d’ailleurs - j’ai vu une course cycliste, c’était le Tour du Tarn, passer devant ma maison. Dans le peloton, il y avait donc Bernard Hinault, qui était tout jeune à l’époque, et je me souviens d’un sacré spectacle pour un petit village comme tant d’autres en France où il ne se passait pas grand-chose. Le vélo, c’était aussi le premier instrument de la liberté pour nous, les gosses… Ensuite, ma sœur a rencontré un coureur cycliste, qui est devenu son mari, et avec mon frère, nous avons commencé à le suivre ; nous sommes ainsi devenus comme lui des passionnés. Nous avons fait beaucoup de rencontres grâce au vélo, il y avait beaucoup de convivialité dans les clubs et je suis devenu un coureur amateur très modeste. J’ai quand même participé à plus de 700 courses et décroché un titre de vice-champion de France de la gendarmerie.


Mais je me suis toujours vu comme l’équipier modèle d’un leader. Et puis j’ai encore eu un gros déclic : la rencontre avec le journaliste sportif Henri Sannier, venu parrainer le Tour de Tahiti en 2010, qui s’appelait alors le Tour de l’amitié. J’étais arrivé ici en 1999 et j’avais ponctuellement participé à quelques courses avant que l’on me propose de contribuer à l’organisation d’épreuves et la rencontre avec ce monsieur passionné, avec lequel nous avons tout de suite partagé de nombreux atomes crochus, a largement contribué à impulser les choses.”


Concrètement, qu’est-ce que ce sport t’apporte ?

Benoît Rivals : “D’abord, j’apprécie vraiment toute la convivialité qui tourne autour du vélo. J’ai toujours évolué au sein de clubs très soudés, et avec les copains, à chaque fois qu’on partait, c’était la fête ! Notamment avec un ami nommé Luiz Alcazar, un Espagnol avec lequel nous adorions semer la zizanie dans le peloton. Mais c’était très sportif aussi et nous avions un véritable esprit de compétiteurs.



Dans les années 90, ce fut ‘apparition des premiers cardio-fréquence-mètres et nous prenions les choses très au sérieux, en mettant au point des courses très tactiques, tout en appréciant vivement au passage, toujours, cette ambiance continuelle de fête populaire dans les villages, les nocturnes avec leur atmosphère si spéciale…”


Comment en es-tu arrivé à la création de la Ronde Tahitienne ?

Benoît Rivals : “Au bout de quelques années de présence en Polynésie, on m’a sollicité pour intégrer la fédération, participer à l’organisation. En 2011, le Tour de Tahiti n’a pu avoir lieu du fait d’aléas politiques. Du coup, nous avons eu l’idée de créer de toutes pièces cette épreuve, jamais vue au Fenua. À l’inverse d’une course classique très compétitive qui ne rassemble que les licenciés des clubs, nous avons eu envie de l’ouvrir à tous ceux qui aiment faire du vélo. Henri Sannier a joué dès le début un beau rôle dans cette aventure. Il est toujours intervenu à nos côtés pour nous soutenir et notamment faire venir les champions (lui qui avait aussi contribué à lancer la première cyclosportive en Picardie et assisté à celle de Martinique).


Or, la première année, nous avons eu plus de 200 participants. Il n’en revenait pas ! D’emblée, l’épreuve a rencontré un vif succès, renforcé par les passages dans plusieurs émissions télévisées (à commencer par Tout le Sport, forcément, dans laquelle nous avons des images tous les ans) et la venue de grands champions tels que Bernard Thévenet, Jimmy Casper, Thomas Voeckler et Laurent Jalabert pour ne citer qu’eux. Tout cela a forcément eu un gros impact sur la participation ; ce qui nous a permis de pérenniser la course en nous insufflant beaucoup de motivation.”


Quels sont les atouts, les spécificités et les valeurs aussi de cette épreuve ?

Benoît Rivals : “La venue de ces grands champions est d’abord super intéressante pour les sportifs locaux,

à qui elle offre de grands souvenirs et une grande source d’inspiration. Mais son premier axe est vraiment l’accessibilité du sport pour tous en permettant à tout le monde de courir. Deuxième axe : une action sociale toujours menée en parallèle pour soutenir des associations œuvrant dans le domaine, comme par exemple la Saga et depuis 3 ans la Fraternité chrétienne. Des enfants handicapés prennent aussi symboliquement le départ avec des parrains. Troisième axe : une vocation écologique à travers la mise en œuvre d’une patrouille verte et surtout, depuis 2014, d’un label éco-citoyen international, Green Cycling, obtenu grâce à la Fédération française de cyclisme et qui en fait la seule épreuve de Polynésie détenant un label de ce type internationalement reconnu.


Enfin la Ronde Tahitienne a un retentissement conséquent sur le tourisme local, en incitant les gens à venir à Tahiti. D’ailleurs, nous avons créé autour un package touristique pour les participants étrangers ainsi que des croisières cyclistes depuis 2018. Ce qui nous a valu à la fois d’être élus parmi les 50 plus belles cyclosportives du monde par le magazine Le Cycle et de nous voir décerner le Trophée du meilleur événement touristique 2017 lors des Trophées du Tourisme.”



Comment êtes-vous parvenus à financer un événement de cette envergure ?

Benoît Rivals : “Cette épreuve est née grâce aux sponsors. Au début, étant chef d’entreprise, j’ai logiquement démarché d’autres chefs d’entreprise, des gens que je connaissais dans ce contexte professionneL Beaucoup de ces sponsors nous ont suivis et nous suivent encore. Il y a même des entreprises qui nous ont appelés pour savoir comment nous sponsoriser ; ce qui est assez rare. Mais aujourd’hui, le Pays nous aide énormément. Ils ne l’ont pas fait tout au début, néanmoins ils ont vite pris conscience de l’ampleur de la chose au point de nous faire profiter de subventions de rattrapage.”


Le cyclisme t’a permis de nouvelles expériences aussi et d’ajouter des cordes plus étonnantes à ton arc ? “Effectivement, cette épreuve m’a permis d’être repéré en tant que speaker (commentateur), ce qui est super gratifiant. Grâce à la notoriété de la Ronde Tahitienne et au fait que je parle anglais, espagnol et français, j’ai l’opportunité de côtoyer un monde cycliste vraiment très intéressant, ici et à l’extérieur. En avril, je commenterai notamment Bourgogne Cyclo, une épreuve qui compte pour les championnats du monde. Je couvrirai aussi la Marmotte de l’Alpe d’Huez pour la troisième fois cette année…”


De quoi es-tu concrètement le plus fier aujourd’hui ?

Benoît Rivals : “Je suis très content d’abord que cette épreuve ait permis de faire évoluer le cyclisme localement. C’est une grosse fierté d’être dans un petit pays au bout du monde et d’avoir une telle reconnaissance. On a même reçu le Trophée du meilleur événement sportif devant la Tahiti Pro et Hawaiki Nui Va’a… des monstres !


Nous étions les seuls amateurs de la catégorie et c’était vraiment quelque chose de fort. La Ronde Tahitienne a surtout produit un vrai engouement pour la discipline et je suis toujours ravi de voir des gens qui se promènent ou vont au travail en vélo… et en portant les maillots de la Ronde que l’on offre sur l’épreuve : ça veut dire qu’il y en a déjà beaucoup qui y ont participé !”



LA RONDE TAHITIENNE

Cette épreuve cycliste sur route de type « cyclosportive » est organisée sur l’île de Tahiti et comporte trois courses au choix : la Grande Ronde de 110 km, la Petite Ronde de 55 km et la Ronde Loisir de 15 km. L’épreuve est organisée par le Vélo Club de Tahiti et des îles et est inscrite au calendrier national de la Fédération française de cyclisme et international de l’Union cycliste. Environ 200 participants internationaux sont attendus (sur un total d’environ 700 coureurs). Notons que le parrain de cette édition 2019 sera Richard Virenque, qui fut longtemps l’un des coureurs cyclistes professionnels préférés des Français.



InstanTANE #06 - avril 2019


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