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Alimentation : le sel, cet indispensable ?

Faut-il le rappeler, l’excès de sel est mauvais pour la santé. Et pourtant, les producteurs ont redoublé d’inventivité et de marketing pour proposer toujours plus de sels différents et séduire les gastronomes. Alors, que faut-il acheter, quels sels faut-il privilégier ? Des sels salent-ils plus que d’autres ? Certains sont-ils plus nocifs à la santé ? Ce comparatif devrait vous apporter un certain nombre de réponses.



Il existe deux sortes de sel :

1) Le sel marin : obtenu par évaporation de l’eau de mer dans les marais salants. En effet, l’eau de mer contient environ 3,5% de sel. Ce sel est lui-même composé de chlore (55%), de sodium (30,6%), de sulfate (7,7%) et pour les 6,7% restants : magnésium, calcium, potassium. Les plus célèbres étant Guérande, l'île de Ré, ou l'île d'Oléron, ou dans les estuaires comme le sel de Maldon.


2) Le sel fossile ou sel gemme : extrait de mines de sel. Il s’agit d’un minéral présent dans les dépôts sédimentaires provenant de l’évaporation de lacs ou de mers. Il existe une mine de sel gemme en France dans la Meurthe et Moselle.

Le sel de table, sel alimentaire ou sel de cuisine, selon l’appellation retenue, mais qui qualifie le même type de sel, est composé essentiellement de chlorure de sodium. Il se présente sous différentes formes : gros sel (ou sel gros), sel fin ou fleur de sel.

Pour celui provenant des marais salants, la dénomination devient « sel marin gris alimentaire », « sel marin gris de table » ou « sel marin gris de cuisine ».

Le sel naturel, non raffiné, contient encore tous ses minéraux naturels.


Les sels naturels ont des propriétés gustatives et un aspect différent suivant la quantité de minéraux qu'ils contiennent. Ainsi, la fleur de sel, le sel des marais salants, le sel gemme (extrait des mines de sel) ou le sel de mer récolté à la main ont une saveur unique qui change d'une région à une autre. On peut presque parler d’une notion de terroirs. Ce sont les sels que nous recommandons. Les sels non raffinés de mer sont plus riches en magnésium (sous forme de chlorure de magnésium) ainsi qu'en oligo-éléments et en fer. Bémol cependant, qu’il ne faut pas sous-estimer : ces sels naturels, contrairement à la plupart des sels industriels, ne sont pas enrichis en iode. Or, ils n'en contiennent que très peu naturellement. Vérifiez donc toujours auprès de votre médecin si vous êtes sujet à une carence en iode. Cette carence peut être traitée.


Le sel raffiné est reconnaissable car il a été blanchi. Il est principalement issu de mines de sel (d’où le nom de sel gemme). Il est raffiné pour que ses impuretés soient éliminées. Il est traité dans une saumure avec des produits chimiques qui précipitent ses impuretés (c’est là qu’il perd magnésium et calcium). Des adjuvants, notamment des anti-agglomérants chimiques, sont alors ajoutés.

Ils permettent aux grains de sel de ne pas coller les uns aux autres, mais ils laissent des traces de cuivre, de plomb, d’arsenic, de cadmium, de mercure, soit des métaux lourds cancérigènes.

Cependant, les autorités sanitaires de France ou d’Europe considèrent qu’ils ne sont pas consommés en quantité suffisante pour être alarmants pour la santé.


Après le séchage, des cristaux purs de chlorure de sodium auront été obtenus. Pendant cette étape, certains industriels enrichissent leur sel avec de l’iodure de potassium (iode), parfois du fluor. Si le fluor aide à se prémunir contre les caries, nul doute que le sel iodé a permis, notamment au 20e siècle, de combattre l’absence d’iode (oligo-éléments) dans les régions reculées, touchées par les problèmes thyroïdiens (goitre) et le crétinisme (l’expression « crétin des Alpes » est justement née de l’absence d’iode dans les montagnes, où les enfants touchés par le crétinisme étaient en proportion plus nombreux qu’ailleurs).


Macération plutôt que salage

Chez les anciens Polynésiens (entendez la civilisation polynésienne d’avant la Rencontre avec les Européens), la symbolisation des aliments était forte. Cela explique les cultures, la préparation des aliments, les rites religieux et les offrandes aux dieux accompagnant la distribution, la consommation et les festins cérémoniels. Un grand nombre d’aliments terrestres ou maritimes étaient concernés, animaux, poissons, mammifères marins, végétaux. Le sel n’a semble-t-il pas été concerné directement par cette liturgie, ni l’eau de mer utilisée en cuisine.


On sait que le taux d’hygrométrie important a empêché les techniques de salage en Polynésie orientale, contrairement à Aotearoa (Nouvelle-Zélande) où elles étaient couramment utilisées, comme le fumage et le séchage.

C’est ainsi que les anciens Polynésiens ont privilégié des techniques de conservation par fermentation, macération ou farines.

En ce qui concerne la macération, c’est le salé qui était privilégié (Serra-Mallol, p. 86). Poissons, crustacés, coquillages variés, gastéropodes étaient mélangés à des morceaux de coco presque mûrs ('ōmoto) et à de l’eau de mer (miti). C’est d’ailleurs ce dernier mot qui est utilisé pour désigner le sel, en reo mā'ohi. Ainsi dit-on du sel importé qu’il est miti papa’ā (synonyme de popa’a, autrement dit sel des Européens). Le gros sel de mer est miti’ao rarahi.


Révolution alimentaire en 1960-1970

Le salé traditionnel desPolynésiens a donc toujours été une macération dans l’eau de mer de l’aliment que l’on souhaitait rendre plus intéressant en bouche.

Après les années 1960, la transition alimentaire s’est faite en quelques années seulement. Aux ma’a tahiti traditionnels, aux poissons du lagon, aux fruits, tubercules et légumes du jardin se sont peu à peu substitué des produits d’importation, de plus en plus industriels et transformés. La mayonnaise a remplacé le re’a Tahiti et la friture a pris la place des tubercules cuits à l’eau.


L’offre en épices et condiments s’est également élargie. Par voie de conséquence, le sel a fait l’apparition dans les caddies de la ménagère polynésienne. Ceci explique pourquoi la production de sel de mer en Polynésie n’est pas développée, même si des initiatives apparaissent çà et là depuis quelques années, comme le sel de Bora Bora, initiative heureuse de madame Fabienne Bratschi, dont le sel obtenu par évaporation est récolté et trié à la main. Comme les raisins d’un grand vin.

Quand on vous dit que le sel, comme le vin, est indispensable à la haute gastronomie… avec modération !


Les sels les mieux notés :

Le sel de Guérande de Reflets de France (Carrefour), arrive en tête de nombreux comparatifs pour son rapport qualité irréprochable / prix maîtrisé.

Le Guérande des Saveur U est également fort bien noté.

Généralement, les sels bénéficiant d’une appellation d’origine protégée (AOP) ou d’une Indication géographique protégée (IGP) sont d’une qualité irréprochable. Certains sont plus chers que d’autres, c’est à vous de voir quel prix maximum vous souhaitez investir dans votre sel.



Tous les sels vendus dans le commerce en Polynésie contiennent entre 83 et 97% de chlorure de sodium (NaCI). Or, plus il y a de chlorure de sodium, plus le sel affichera un goût salé. Moins il a de NaCI, plus on peut jouer de sa couleur, de sa texture, de son fondant et de son croustillant.


Attention, les « sels spéciaux » ont tendance à contenir plus de métaux lourds et contaminants (uranium, aluminium, cadmium) que les sels alimentaires usuels. Aucun, cependant, à un stade indésirable ou risqué.


Le sel est-il mauvais pour la santé ?

D’emblée non. Il est même nécessaire à l’équilibre chimique de notre organisme et au bon fonctionnement du cerveau. On en perd constamment par la sueur, l’urine, les larmes : il faut donc en consommer 3 à 5 g par jour à l’âge adulte pour refaire ses réserves (L’Organisation Mondiale de la Santé recommande 5 g de sel par jour).


En revanche, tout excès de consommation pose problème. La pincée de sel marin que vous ajoutez sur une viande lors de sa cuisson ou dans une salade verte ne pose aucun problème (surtout que le sel marin contient du magnésium qui agit comme un antidote aux méfaits du sodium). Elle pose problème si vous avez mangé, avant cela, des biscuits apéritifs gavés de sel, que vous consommez des plats industriels tout préparés eux-aussi gavés de sel, régulièrement. Car notre consommation actuelle est évaluée entre 10 et 12 g/jour. C’est trois fois trop.


De plus, le goût du sel utilisé par les industriels est masqué par d’autres additifs, car sans cela, avec la quantité de sel intégrée aux plats préparés, ils seraient immangeables. Les aliments contenant le plus de sel sont les charcuteries et les fromages, ainsi que les préparations cuisinées.

Or, la surconsommation de sel entraîne de graves problèmes de santé, comme l'hypertension ou l'obésité qui sont la cause de plusieurs dizaines de milliers de morts prématurées chaque année. A vous d’être vigilants.


Les sels que l’on peut choisir :


Le sel de table

Ce sel gemme est blanchi, affiné, puis additionné d’anti-agglomérants, d’iode et de fluor. Une fois raffiné de la sorte, il a pratiquement perdu tous ses nutriments d’origine et se compose à plus de 95% de chlorure de sodium. Pas cher, pas bon, vous pouvez vous en passer.


Le sel de mer fin

Identique au sel de table... sauf qu’il n’est pas raffiné. Comme il n’a rien perdu de ses oligoéléments et minéraux (magnésium et fer), ce sel « complet » aide notre corps à digérer, l’incitant à produire les enzymes nécessaires à la récupération des nutriments dans les aliments.


Des grains de riz feront l’affaire pour éviter qu’il ne devienne une masse collante.

Le gros sel de mer

Ces gros cristaux se forment au fond des marais salants, lors de l’évaporation de l’eau. Plus le processus est lent, plus leur taille sera importante. Le gros sel n’est composé que d’environ 85% de chlorure de sodium, soit bien moins que le sel raffiné. Sa salinité plus faible laisse davantage de place au goût des aliments, en plus de le rendre meilleur pour la santé. Sur une pièce de viande grillée ou des légumes, il donnera du croquant. Également indispensable à toute recette en croûte de sel réussie !


La fleur de sel

Contrairement au gros sel, la fleur de sel se forme à la surface des marais salants de la côte atlantique européenne, et seulement dans des conditions de vent particulières. Cette fine «croûte» de sel se récolte délicatement... d’où son prix ! Entre douceur et craquant, elle fait merveille en touche de finition sur un carpaccio de thon ou de bœuf, un porc croustillant, une salade de pota ou des pahua juste récoltés, dégustés au citron sur tatahi.


Le sel en flocons

Plus grosses que celles de la fleur de sel, les paillettes iodées du sel en flocons fondent aussi moins rapidement. Le fameux sel de Maldon (importé par L’Epicurien) est obtenu à partir d’eau de mer de l’estuaire de la rivière Blackwater, en Angleterre, que l’on filtre et fait bouillir jusqu’à évaporation. Ces pétales de sel apportent une différence par leur forme cristalline, qui ajoute de la texture en bouche.


Le sel rose de l’Himalaya

Sel de mine et non de mer, le sel rose provient de la zone géologique de l’Himalaya, au nord-est du Pakistan, dernière trace d’un océan disparu depuis des millions d’années. Comme ces gisements sont à plus de 600 m de profondeur, le sel qu’ils contiennent a été protégé de toute pollution, ce qui lui permet de contenir pas moins de 80 nutriments, dont du fer qui, en s’oxydant, lui donne sa couleur (plus il est foncé, plus la teneur en fer est élevée). Cependant, en terme de goût, il n’apporte rien de plus à un sel fin. 1/5e des besoins quotidiens en fer sont couverts par une consommation de 5 g de sel rose d’Himalaya.


Le sel noir de Hawaii

Récolté dans l’océan Pacifique, notamment à Hawaï, le sel noir doit sa couleur étonnante aux pierres de lave volcanique présentes au fond de ses bassins salants. Le charbon actif qu’il contient stimule notre système digestif et on le dit même détoxifiant. Son goût n’est pas exceptionnel, mais le contraste de couleur sur certains aliments clairs est esthétique. Attention à la qualité : certains sels sont simplement teintés par des bouts de pierre volcanique jetés dans leur eau !


Le sel de Hawaii existe aussi en rouge : c’est un sel de mer non raffiné, ramassé dans les salines de Molokai à Hawaï, mélangé à une argile volcanique sacrée rouge que l'on appelle Alaea (ou Alae). Il donne une légère saveur de noisette grillée aux aliments, saveur provenant de l'argile rouge qui le compose. Il en profite aussi pour colorer les aliments en contact en rouge.




Le sel bleu de Perse

Il contient des quantités relativement élevées de potassium, au point que 5g de sel (dose quotidienne maximale) couvrent près d’un quart des besoins journaliers en potassium. Sinon, son goût est très proche d’un sel fin de mer.



Le sel aromatisé

Ajoutez à du sel non raffiné gris, rose ou noir des herbes et des épices séchées pour créer des mariages de saveurs qui parfumeront les plats. Tout est possible: piment d’Espelette, algues, cèpes, fleurs, coriandre, érable, alouette! Du sel au re’a Tahiti pour réveiller un perroquet au citron, un sel au romarin pour l’agneau de Aotearoa. Si on veut concocter son propre mélange, rien de plus simple : on moud au mortier 2 cuillères à soupe de sel pour 1 cuillère à thé de l’ingrédient de son choix et on laisse reposer une semaine dans un contenant fermé.

Le sel de sésame

Dans le cas du sel de sésame ou gomasio, les proportions sont inversées: on parle d’une demi-tasse de graines de sésame mélangées à 2 cuillères à thé de sel de mer. On fait dorer le mélange à la poêle ou au four (sans corps gras), on laisse refroidir et on écrase au pilon.

L’équilibre entre la teneur en calcium du sésame et celle en magnésium du sel permet à notre système digestif de mieux assimiler les nutriments du sel. D’ailleurs, ce dernier est si peu présent dans le gomasio que cela en fait une très bonne façon de se désaccoutumer du trop salé.

A retrouver dans le magazine Tama’a n°07


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