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Elevage sur les atolls

Textes : Frédéric Torrente - Anthropologue


Les cochons (puaka) circulaient en toute liberté et étaient capturés à l’aide de pièges. Les chiens (gaeke) étaient mangés dans tout l’archipel, constituant une source régulière d’apports carnés. La préparation et la cuisson étaient les mêmes que pour les porcs, le chien étant considéré comme un mets de choix. Le rat polynésien (kiore) était également piégé et consommé.



Chasse des oiseaux et récolte des œufs

Les oiseaux représentaient une source importante d’alimentation et leur chasse était couramment pratiquée. La chasse aux oiseaux correspondait à certaines périodes du calendrier d’Anaa, notamment aux mois lunaires Piripiri-tau-ai-a-manu (correspondant approximativement au mois de décembre), et Manu (autour du mois de février). On capturait à la main les fous kariga, les frégates kotaha, les sternes blanches kirarahu, qui étaient mangées grillées. D’autres oiseaux étaient chassés de nuit à la torche, ou étaient pris au collet ou avec des filets.


Capture des crabes

Dans certains atolls, le crabe de cocotier (kaveu) était chassé la nuit, appâté par des noix de coco coupées en deux sur le tronc d’un arbre, et capturé à la torche, saisi par l’arrière. Son énorme pince et patte était cassée et le crabe mis dans un panier. Comme il n’était pas facile de saisir le crabe à mains nues, une branche fourchue pouvait être utilisée pour le maintenir jusqu’à ce qu’il soit bien saisi. Quand il se réfugiait dans un trou, on y introduisait un bâton, qu’il serrait assez fortement pour qu’on puisse l’extirper.

Deux autres espèces de crabes terrestres étaient mangés : le tupa (Cardisoma carnifex) et le fākea (Geograpsus stormii), qui est une variété aux pattes dépourvues de poils et plus rougeâtre que le tupa.


Pêche dans les étangs d’eau douce

Les nombreux étangs de l’atoll abondaient en poisson pati (Chanos chanos), qui était consommé. Les anguilles (tuna, puhi pape) qui étaient élevées (fagai) dans les points d’eau sacrés des chefs étaient également mangées.



Des ressources marines plus stables, mais fragiles

Si les gens des Tuamotu appellent la mer « le garde-manger », affirmant ainsi la stabilité et la pérennité des ressources marines, elles n’en restent pas moins aujourd’hui fragilisées par la modernité. Dans certains atolls de l’est, la pauvreté en animaux terrestres et le manque de fertilité des sols ont contraint les habitants à consommer une très grande quantité de poisson et de fruits de mer, ce qui a bien sûr conduit à mettre en œuvre des méthodes de pêche aussi ingénieuses qu’adaptées au milieu.


Les récifs coralliens et les atolls polynésiens sont des écosystèmes très riches, fournissant depuis le peuplement aux habitants la base de l’apport alimentaire en protéines. Issue de siècles d’interactions fines avec l’environnement marin, les Pa’umotu ont une connaissance élaborée des espèces marines, avec des dénominations précises des espèces et de leur stade de croissance, des habitats et des cycles de reproduction. Toutes les espèces de la mer étaient consommées, certaines entourées de tapu faisaient l’objet de rites religieux, d’autres étant interdites aux femmes.


Les méthodes de pêche (tautai) étaient très nombreuses, certaines étant encore pratiquées aujourd’hui, à savoir la pêche au harpon, la pêche à la ligne (kanehu) ou à la traîne (tāvere) et la pêche au filet. Jadis, les techniques de rabattage du poisson dans des baies (fakakopa), la pêche communautaire (rena), la pêche de nuit au flambeau (rama) rythmaient les activités quotidiennes. La capture des tortues, des mammifères marins et des bonites, faisait l’objet de rites et étaient offerts aux dieux avant d’être partagés entre les aînés des différents clans. Paul Ottino à Rangiroa (1964) et plus tard Eric Conte à Napuka (1986, 1990) ont bien montré qu’il existait des marae spécialement destinés à la pêche (marae toatoa i’a) et à la consommation de certaines espèces de carangues, balistes, totara et hue.


Les parcs-pièges à poissons, structures fixes et durables en corail, étaient placés dans le lagon (roto) ou sur le platier récifal (akau). Ils étaient destinés à emprisonner passivement le poisson en utilisant les courants entrants ou sortants.


Cette technique répandue dans toute l’Océanie constitue un trait culturel remontant au Néolithique.

Ils étaient la propriété des familles étendues et leur usage relevait de la sphère privée, portant un nom bien précis. Leur complexité architecturale s’étendait de simples murs de corail kaua takeke convergeant vers un goulet étroit au fond duquel était placé un filet, jusqu’aux multiples pièges ayant des ouvertures côté océan et côté lagon. On se servait aussi de végétaux (branches de pandanus ou de geogeo, Heliotropium foertherianum), en complément de la structure de pierre.


Des viviers (tipua) constitués d’enclos de pierres ou de poteaux dressés permettaient de conserver le poisson vivant et de pratiquer l’élevage.






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Dossier à retrouver dans votre magazine Tama'a# 28 - juin 2023

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